Horloge squelette - vers 1830

Photos © Peter E. Greutert – tous droits réservés

4 février 2020
Une horloge d’origine inconnue, non fonctionnelle, avec échappement à chevilles, trois tambours, trois marteaux et un mécanisme complexe de sonnerie des quarts d’heure. Probablement une comtoise, vers 1830, au vu des nombreuses pièces communes. Les poids et le pendule sont absents, le cadran rond est rapporté, sans système de fixation. Peut-être une réalisation de fin d’études ou une commande particulière ?

Je découvre ce mécanisme. Avant de le démonter il convient d’étudier son fonctionnement et faire un inventaire des pièces manquantes, ainsi que de leurs poids & mesures.

Horloge squelette - vers 1830

Le tour de l’horloge en 8 photos


Chapitre1 – DÉMONTAGE

6 février 2020
L’examen visuel de l’horloge a permis de consigner par écrit les observations et d’établir un devis des travaux à effectuer. Il a également confirmé le bon fonctionnement “de principe” de l’ensemble horloge / sonneries. Une liste des pièces manquantes permettra d’ouvrir la chasse aux occasions, voire l’achat de pièces neuves (poids, etc).

Horloge squelette - vers 1830

7 février 2020
Démontage du mouvement. La taille des pièces et la nature des outils pour cette opération diffèrent beaucoup de la “petite” horlogerie. Marteaux, clés à molette, gros tournevis et chasse-goupilles sont de la partie. Les pièces sont soigneusement étiquetées et entreposées dans des boites en carton et attendant leur rafraichissement.

Horloge squelette - vers 1830

Quelques gros plans montrent la beauté, teintée de “patine antiquaire”, d’objets qui datent de bientôt deux siècles !

Horloge squelette - vers 1830
Avant démontage des sous-ensembles on dénombre déjà plus de 50 pièces, sans compter les vis, goupilles et autres petites pièces.

Chapitre 2 – NETTOYAGE

9-17 février 2020
Les pièces les plus atteintes sont celles en acier / fer : tout est rouillé. L’électrolyse semble la méthode de dérouillage qui préservera au mieux l’intégrité des métaux. Leur protection après remise en état se fera par brunissage, vernis Zapon ou cire Renaissance. Le choix n’est pas encore arrêté.

Je pensais à l’origine qu’une demi-journée suffirait à nettoyer les pièces… grosse erreur ! Mais ce n’est pas grave, la méthode fonctionne et le résultat sera là.

Horloge squelette - vers 1830
Grande cloche : elle sonne la fondamentale en do, on entend l’harmonique en quinte (sol) ainsi que le do un octave au dessus. La petite cloche sonne mi bémol, avec une quarte harmonique (la bémol) ainsi que mi bémol un octave au-dessus.

18 février 2010
Pourquoi le traitement des pièces rouillées est-il si long ? Plusieurs étapes sont nécessaires à cette fin :
1. Démontage intégral du sous-ensemble. Par exemple, les barillets illustrés ci-dessous sont chacun composés de 7 pièces, toutes plus oxydées et inaccessibles les unes que les autres.
2. Brossage initial à la brosse laiton pour enlever le gros de la rouille. Parfois il faut recourir au tourne-vis pour détacher les plaques épaisses de rouille.
3. Bain d’électrolyse, entre 1.5 et 2.5 heures. Il n’est souvent pas possible de traiter toutes les pièces d’un sous-ensemble en même temps. Chaque pièce doit être attachée à un fil de cuivre conducteur et rien ne doit produire un court-circuit dans le bain !
4. Premier rinçage à l’eau et inspection. Souvent les étapes 2 et 3 doivent être répétées une ou deux fois pour un résultat optimal.
5. Brossage final, essuyage et dégraissage à l’acétone.
6. Brunissage (à froid) par immersion dans une solution ad-hoc.
7. Rinçage et séchage.
8. Traitement à l’huile pour fixer le brunissage.
9. Laisser l’huile pénétrer puis essuyer avec précaution.
10. Lustrer les pièces en laiton. Sur les barillets par exemple il est impossible de séparer l’axe en acier du tambour en laiton. La solution de brunissage peut avoir tarni le laiton et il faut corriger.
11. Finalement, traiter le laiton à la cire “Renaissance” pour retarder la réapparition de l’oxydation.

Voilà, UN sous-ensemble “rouillé” est terminé. Comme il y en a une dizaine…

Puis vient le tour de toutes les pièces en laiton seul. Mais ceci est une autre histoire.

AVANT / APRÈS – Deux des trois barillets.

19 février 2010
Les établis sont bien chargés ! Toutes ces pièces démontées prennent beaucoup de place. Rien à voir avec un rhabillage de montre bracelet… La plupart des pièces en acier sont terminées, brunies et huilées comme une arme de poing. Il reste à traiter quelques rouages, ainsi que le bâti du mouvement.

20 février 2020
Quelques photos de pièces restaurées. Il subsiste heureusement un peu de patine, mais la crasse et la rouille sont bien partis !


Chapitre 3 – REMONTAGE

21 février 2020
Le remontage de certains ensembles terminées peut commencer, pendant que les dernières pièces en sont encore au dérouillage. Les barillets sont les premiers à retrouver leur assemblage : fonctionnel, huilé et resplendissant. Les marques du temps n’ont pas toutes disparues et c’est bien ainsi. Il ne s’agit pas de refaire du neuf avec du vieux !
Une couche phosphatée noire (= brunissage) protège les aciers et une fine application de cire Renaissance By Appointment To Her Majesty The Queen scelle les laitons.

À remarquer est le soin avec lequel les pièces sont identifiées : une, deux ou trois marques permettent de remonter les barillets sans mélanger les pièces. La roue, le tambour, le ressort et le cliquet sont ainsi dûment poinçonnés.

Barillet n° 1 remonté !
Les trois barillets après restauration.

Après beaucoup de temps passé à nettoyer et dérouiller, l’heure du remontage a sonné ! Il a été impossible de conserver la patine tout en faisant fonctionner le mécanisme : j’ai dû aller jusqu’au bout, sinon le travail paraissait à moitié fait. Au fil du temps la cage perdra son aspect un peu trop propret et retrouvera un habit qui sied bien à une vieille dame. On vise les 400 ans ?
Il reste les pivots à polir et demain commence le réassemblage.

L’horloge est prête pour le remontage !

22 février 2020
Le remontage fut relativement facile. Comme on peut le constater sur la première photo ci-dessous toutes les pièces sont identifiées, l’erreur de montage est quasi exclue. Il a fallu penser à polir tous les pivots, pour éviter que leur brunissage ne se dépose dans le palier et ne forme un tas abrasif.

Gros plan sur le mécanisme.
Gros plan sur le mécanisme.
Gros plan sur le mécanisme.

Quelques photos AVANT / APRES mettent bien en évidence l’ampleur du travail de restauration.

23 février 2020
Suspendue à un poteau de l’atelier, le réglage de l’horloge peut commencer. Pour l’instant, “telle quelle”, elle boîte (le tic est plus long que le tac), il faut deux poids (2.4kg) pour le mécanisme et le balancier n’est pas assez lourd. Je l’ai provisoirement lesté d’un kilo supplémentaire. Il me faut dans un premier temps régler l’échappement, car elle s’arrête au bout de quelques minutes.

Premiers essais de marche à l’atelier.

25 février 2020
Journée de polissage / dérouillage du balancier et des aiguilles. L’aiguille des heures avait perdu son doigt, il y fallu en ajouter un nouveau : découpe, brasure, limage, brunissage et le tour est joué ! Le reste de la journée est passé très vite à régler la marche des carillons. Déterminer les poids nécessaires à leur fonctionnement s’est fait à l’aide de bidons de 5 litres, qu’il suffit de remplir d’eau jusqu’à ce que ça marche. Cele permettra de commander ou chiner les poids en fonte qui vont bien.

26 février 2020
Journée de réglages et finitions. Avec deux fois 5kg de poids les carillons fonctionnent correctement. Ils sonnent le quart (1 coup double), la demie (2 coups doubles), les trois quarts (3 coups doubles) et les 4/4 (4 coups doubles). Une minute plus tard sonne l’heure, qui est répétée après une autre minute.

Cette comtoise avec échappement à chevilles requiert un balancier lourd. Celui qui me fut livré sied bien à ce mouvement squelette (tige fine et lentille simple), mais il n’était pas assez lourd. Un lest en laiton, fixé de manière invisible à l’arrière de la lentille, pallie ce défaut.

L’aiguille des minutes a nécessité le tournage d’un canon (=petit tube) servant d’écarteur. Il stabilise l’aiguille contre sa goupille.

Il reste à accrocher le cadran, au moyen de pattes brasées sur le cadran, qui viendront se poser sur la cage, sans modification de cette dernière.

27 février 2020
Les touches finales à l’oeuvre de restauration : l’accroche du cadran. Pour préserver la cage j’ai décidé de rendre le cadran amovible et l’ai fixé par quatre crochets brasés sur le cercle du cadran. Ainsi rien n’est modifié sur l’original.


Chapitre 4 – PHOTOS FINALES

29 février 2020 – Photos finales, sans et avec le cadran


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